Cela fait maintenant trois mois que j’ai couru mon premier ultra-trail. Bon, on n’est pas tous d’accord sur le nombre de kilomètres à partir duquel on peut parler d’ultra, mais peu importe.
Cet ultra-trail, il s’agit du Grand Raid des Pyrénées dans sa version « Tour des lacs » soit 80 km et 5000 m de dénivelé positif et un passage au célèbre pic du Midi. J’ai pris la décision de m’y inscrire l’année dernière après avoir fini le 40 km du Gavarnie Trail. Très peu de temps après la course, l’idée a commencé à germer dans mon esprit : « Pourquoi ne pas faire le double ? ».
J’avais vraiment adoré ce type de course, l’ambiance qui y règne, les paysages grandioses, l’impression d’avoir tout le temps devant soi, de ne jamais regarder le chrono… etc., bref tout ce qu’on ne retrouve pas toujours sur les 10 km route.
La préparation
Habitant dans les Landes dont le point culminant est à 237 m d’altitude, il n’est pas facile de s’entrainer régulièrement en montagne.
J’ai donc programmé des courses jalons afin d’avoir des objectifs paliers à atteindre avant le jour J.
J’ai donc commencé par la Gotorlekuen Itzulia à Saint-Pée-sur-Nivelle début mars : 42 km et 2800D+ sous un temps affreux.
S’en sont suivi quelques courses un peu moins ambitieuses en avril comme Les Délices de l’Ursuia à Hasparren (21 km/1300D+) ou le trail du Barétous à Arette (25 km/1300D+).
Le mois de juin arrive, il est alors temps de monter un peu en régime pour voir si les jambes tiennent le coup. Je m’aligne donc sur les 53 km du trail de la Montan’aspe à Bedous. 3500 m de dénivelé positif que j’arrive à boucler en un peu plus de 10 h de course. À l’arrivée, j’ai conscience que je n’ai pas 30 km de plus dans les jambes, le GRP fin août, ça ne va pas être « finger in the noise » !
Je décide donc de me programmer une dernière course début juillet pour faire la caisse avant mes 2 semaines de vacances dans les Dolomites et en Grèce. C’est donc la course des refuges à Cauterets qui servira de dernier test : 43 km et 2600 D+. Verdict : j’ai mis quasiment autant de temps à la finir que la Montan’aspe le mois dernier alors qu’il y a 10 km et 1000 m de D+ en moins, c’est dire si la course est difficile ! De nombreux passages dans la caillasse, des descentes enneigées, un passage en altitude où le manque d’oxygène se fait sentir, bref rien de très rassurant en vue de l’objectif !
J’arrive donc fin août avec de la préparation, mais peu de certitudes.
L’avant course
Nous arrivons à Saint-Lary le vendredi dans l’après-midi. Nous allons directement à Vielle-Aure pour repérer le lieu de départ et récupérer le dossard.
Le village départ est très animé quand nous arrivons puisque des coureurs arrivent par dizaines sur la ligne d’arrivée. En effet, le GRP organise plusieurs courses sur plusieurs jours et le départ du 42 km a été donné le matin même.
Du coup, c’est un peu le bazar quand nous arrivons et on ne localise le stand des retraits des dossards qu’après quelques bonnes minutes d’errements.
Dès le retrait du dossard, je vois la différence avec les « petites » courses que j’ai faites jusqu’à présent. Il y a beaucoup plus de participants et l’organisation est bien rodée.
On doit vider notre camelbak dans un bac, remplir un papier et l’organisation vérifie point par point chaque élément obligatoire avant de tamponner le papier d’inscription.
Ensuite, on récupère un sac. J’entre-ouvre le sac et j’aperçois un saucisson, c’est bon ça suffit à mon bonheur :)
Pas de tee-shirt puisque celui-ci sera à récupérer sur la ligne d’arrivée avec la mention Finisher ! Il faudra donc le mériter celui-là !
Je sors de la tente et on doit faire vérifier que la puce du dossard fonctionne : à priori c’est OK.
Le dossard est assez joli, mais surtout, il est très utile puisqu’il y a le profil de la course en vue inversée !
En revenant à la voiture, j’aperçois quelques concurrents du 40 km qui finissent, très heureux, mais aussi pour certain(e)s très marqué(e)s ! Je m’imagine sur cette dernière ligne droite après 80 km d’effort, ça sera enfin fini, je l’aurais fait ! À ce moment-là, j’ai alors hâte d’en découdre !
L’heure étant déjà bien avancée, on file prendre possession du studio que nous avons loué dans le centre de Saint-Lary.
Sur le bord de la route, je croise Arnaud, un copain d’enfance que je n’avais pas vu depuis très très longtemps. Je savais qu’il la faisait, mais je ne pensais pas avoir la chance de le voir au milieu de tous ces participants ! Ça fait hyper plaisir de le voir et de discuter même pour quelques secondes !
Juste le temps de poser les affaires à l’appart’ que nous repartons à Vielle-Aure sur la zone de départ pour la pasta party. Ça tombe bien, je crève la dalle !
Il n’y a pas grand monde et ce n’est pas plus mal, on est de retour à l’appart en même pas une heure.
C’est l’heure de checker le camelbak une dernière fois !
Comme vous le voyez sur la photo ci-dessus, il faut emporter pas mal de trucs avec soi : tenue légère, tenue chaude, une veste imperméable, casquettes, gants, lunettes, deux lampes frontales en état de marche avec pile supplémentaire, couverture de survie, gobelet rétractable, bande adhésive élastique, une réserve d’eau et bien des ravitaillements solides ! Je prends en plus ma GoPro pour filmer tout ça et mes bâtons de trail 3 brins (ultra pratique de pouvoir les plier quand on ne s’en sert pas) !
La course
3 h 30, le réveil sonne ! Bon, j’étais déjà réveillé depuis une bonne demi-heure comme si mon corps savait ce qui l’attendait.
Tous les coureurs vous le diront, c’est très difficile de faire une bonne nuit de sommeil la nuit juste avant la course.
Un départ presque in extremis
Je traine un peu au lit, je prends le petit déjeuner tranquillement et c’est l’heure de rallier la zone de départ.
Je dois retrouver Thomas, avec qui j’ai sympathisé lors de la Montanaspe en juin. On avait couru une grosse partie de la course ensemble et pur hasard, on était inscrits tous les deux à la même course sur ce GRP. On a donc prévu de la faire ensemble.
On se retrouve non loin de la ligne de départ vers 4 h 40. De là où on est, on aperçoit les coureurs sur la ligne. On blablate quelques minutes avant de se rendre compte qu’il faut faire le tour d’un bon pâté de maisons pour pouvoir rejoindre la ligne de départ. Du coup, on se met à courir afin de rallier la zone. On arrive enfin à la porte permettant d’accéder à la ligne de départ. Un bénévole est chargé de badger le dossard de chaque participant. Devinez à quelle heure on a badgé ! 4 h 57 !! Large !
J’avais aussi prévu de retrouver Gilles, avec qui j’ai couru la Senpereko en février, pour lui faire un petit coucou avant le départ. Je l’appelle sur le portable, et on arrive à se trouver seulement une minute avant le départ ! C’était moins une !
En place sur la ligne de départ seulement 3 minutes avant le début de la course, je suis incorrigible…
5 h, le départ est donné. Beaucoup beaucoup de monde, nous sommes 1200 à nous élancer sur ces 80 km !
On piétine un peu sur les premiers mètres, le temps que le peloton s’étire.
Au bout de 2 km de plat, on attaque déjà la première montée du programme : environ 1400 m de dénivelé positif avant le premier point de contrôle situé au 15e kilomètre à Merlans.
Le rythme est assez tranquille, les gens discutent beaucoup, c’est le début de la course et ça se sent !
Un lever de soleil mémorable
Peu avant 7 h, on commence à voir apparaitre la cime des sommets environnants. Le lever de soleil vaut le détour. Je m’arrête pour faire une photo, mais le téléphone ne veut pas faire la mise au point, tant pis !
À chaque fois que je me retourne, j’observe le ballet incessant des frontales qui dansent dans l’obscurité. C’est beau !
On atteint les premières remontées mécaniques de Saint-Lary Pla-d’Adet vers 7 h. C’est assez bizarre de me dire que je cours sur les pentes que j’ai l’habitude d’emprunter en ski l’hiver !
Au 10e kilomètre, on a le droit à une légère descente avant que ça ne remonte de plus belle.
Les frontales sont maintenant inutiles, le soleil est maintenant assez haut dans le ciel. C’est l’occasion de pouvoir profiter du paysage pour la première fois et c’est déjà très beau !
Il n’y a pas un seul nuage à l’horizon, le temps s’annonce superbe, espérons juste qu’il ne fasse pas trop chaud !
Au 14e kilomètre, on passe de nouveau au sommet d’un col, l’occasion de profiter d’un panorama à 360°.
Le premier ravito est à 1 km de distance et ça descend. L’occasion de croiser quelques participants du 220 km qui sont en sens inverse et qui, eux, sont bien plus proches de la fin que du début !
Nous arrivons au CP1 à Merlans à 7 h 45 (donc après 2 h 45 de course).
Pas de pépins physiques pour l’instant, les jambes répondent bien.
Thomas est OK également. On en profite pour faire le plein de charcuterie : saucisson, chorizo, jambon, fromage… J’ai sacrément la dalle puisque le petit déjeuner pris au réveil remonte déjà à 4 h.
Nous avons fait un peu plus de 15 km pour 1400 m de dénivelé positif. Nous sommes à 1900 m d’altitude, le prochain col à atteindre, le col du Bastan, est à environ 2330 m d’altitude, ce sont donc 400 m de D+ qui nous attendent pour atteindre le quart de la course !
Des lacs, en veux-tu en voilà !
Sur cette partie, je serais incapable de vous calculer le nombre de lacs que nous avons longé !
Les reflets sur les lacs sont sublimes, j’en profite pour en prendre plein les mirettes d’autant plus que la pente reste encore assez douce (ce qui ne va pas durer…).
Nous atteignons le col du Bastan (21e kilomètre) à 9 h après 4 h de course.
Juste qu’ici, pas de bobo, des paysages déjà incroyables, bref ce n’est que du plaisir ! Nous sommes assez larges au niveau des barrières horaires donc c’est plutôt rassurant pour la suite.
Le prochain point de contrôle se situe à la Mongie, station que je connais très bien puisque j’y skie tous les hivers. Il nous reste 10 km avant d’y parvenir : 8 km de descente et 2 km de montée terrible : la plus courte ascension, mais aussi celle où le pourcentage de pente est le plus ardu. C’est celle que je redoute le plus, car on va y passer vers 11 h, l’heure où le soleil va commencer à taper sévère !
On traverse de nouveau une zone remplie de lacs aussi beaux les uns que les autres : lac Arrédoun, lac du Campana, lac de Gréziolles…
À un moment donné, on passe par un gigantesque barrage au niveau du réservoir des Laquets. C’est gigantesque, c’est grandiose, bref on en profite un max puisque se profile au loin la montée qui va nous amener du côté de la Mongie.
Et cette montée, comme prévu, elle fait mal ! Le soleil tape fort et la pente se révèle être très rude par endroits.
Finalement, nous arrivons en haut après 40 minutes d’ascension (pour faire 1,8 km !!).
La vue depuis le sommet est une belle récompense : la station de la Mongie en contrebas et le Pic du Midi en face, qui semble tellement loin.
Qui dit « montée terrible » dit « descente dans le même genre »…
Le genre de descente où il faut constamment mettre le frein à main pour ne pas prendre trop de vitesse et partir dans le décor. Pour moi, la plus grosse difficulté, c’est de constamment regarder ses pieds ! Quand on a une telle vue devant soi, on ne veut pas en manquer une miette. Malheureusement, le terrain nous rappelle vite à l’ordre si on lève la tête un peu trop longtemps.
Heureusement pour mes jambes, la descente est assez courte, on arrive en bas en seulement un quart d’heure.
Check-point à la Mongie avant d’entamer l’ascension au Pic du Midi
L’arrivée à la Mongie est comme un bref retour à la civilisation. Il y a beaucoup de monde, les gens nous applaudissent chaleureusement et ça fait très plaisir, c’est presque comme une haie d’honneur à l’arrivée sauf qu’il reste encore 50 km…..
Nous passons donc au 31e kilomètre en 6 h 42 de course, toujours aucun pépin physique ni pour Thomas ni pour moi.
Je retrouve Lucie qui est venue m’encourager au ravito. Avec Thomas, on décide de s’arrêter un moment le temps de bien manger, de bien s’hydrater et de refaire le plein d’énergie !
Ce qui nous attend maintenant est un monument : le pic du Midi et ses 2876 m d’altitude !
On le sait, la montée va être longue, très longue. Et on va devoir se la farcir dans le moment le plus chaud de la journée : 12 h-15 h.
Bref, on a fait 30 bornes, mais on n’a encore rien fait vu ce qui nous attend !
Dès le début, ça grimpe face à la pente, on est obligés de faire des Z pour adoucir la pente.
On traverse le secteur du télésiège Sud, j’essaie de me repérer en fonction des remontées mécaniques, car j’ai du mal à reconnaitre les pistes sans la neige.
On a toujours le Pic du Midi en visu, mais il parait encore tellement loin et tellement haut.
Au fur et à mesure qu’on progresse, on a l’impression d’avoir fait un grand pas en avant puis on réalise que le pic est toujours aussi loin, c’est assez décourageant.
La chaleur rend l’ascension encore plus difficile. Il n’y a aucun nuage à l’horizon donc aucun répit, mais on ne va pas se plaindre, avoir un temps pareil, c’est toujours mieux que des trombes d’eau !
Une heure après notre départ de la Mongie, on est encore très loin du compte. Le point de contrôle situé au col de Sencours n’arrive jamais, et en plus je commence à avoir des soucis musculaires à la cuisse droite. Je ralentis alors le rythme et je vois Thomas s’éloigner bien plus vite qu’avant. Il est contraint de m’attendre de plus en plus longtemps.
Au 35e après 8 h 20 de course, je reconnais un lieu que je connais bien, l’arrivée du télésiège « La Panoramic ». Cet « événement » suffit à me remettre un peu dans la course et je reprends espoir d’enfin apercevoir ce foutu ravitaillement !
Ce sera chose faite 40 minutes plus tard !
À 14 h, nous atteignons enfin le ravito du col de Sencours situé au « pied » du Pic du Midi.
De là, on aperçoit clairement tout le sentier qui mène en haut du Pic. À ce moment-là, dans ma tête, je suis partagé. D’un côté, je suis découragé, car il y en a encore pour une bonne heure de montée et de l’autre, je suis excité à l’idée d’enfin arriver au sommet de ce pic mythique !
Finalement je remarque que la montée se fait en zigzag et donc que la pente est douce. Le chemin a l’air assez praticable donc ça devrait le faire !
On décide d’ailleurs avec Thomas, de ne pas trop s’arrêter au ravito afin d’attaquer la dernière partie de l’ascension directement. On prévoit de s’y arrêter plutôt au retour (ce qui s’avérera être une erreur).
L’ascension au Pic du Midi
La montée se révèle assez agréable, le sentier est large, c’est praticable. On hésite même à courir par endroit, mais on préfère en garder sous le coude !
Je croise Gilles en pleine bourre dans la descente. Il a l’air hyper frais, il me confirme que le sentier reste comme ça jusqu’au bout et qu’il n’y a pas de réelle difficulté.
Ce qui me réconforte, c’est de voir la façon dont les gens descendent. Le peu de pente autorise le laisser-aller, ça a l’air assez facile. Mais on n’en est pas encore là ! De temps à autre, on aperçoit le Pic du Midi qui a l’air très proche, mais c’est dur de savoir, car ça fait bien une heure qu’il a l’air très proche !
En tournant la tête à l’opposé, on jouit d’une vue totalement incroyable sur les Pyrénées. Ceux qui sont déjà montés au Pic du Midi savent de quoi je parle !
Finalement, nous accédons à la plateforme de l’observatoire du Pic du Midi peu après 15 h 10 !
Nous sommes alors à la moitié de la course en distance : km 40, 3600 m de dénivelé positif et 10 h 7 de course.
On retrouve Lucie au sommet, elle a pris le téléphérique pour venir nous voir en haut. Pour elle aussi, c’est une journée marathon !
On ne s’éternise pas trop en haut du Pic du Midi. C’est mon seul petit regret d’après course, j’ai l’impression de ne pas avoir assez profité de la plateforme d’observation. Mais finalement j’ai eu tout le temps de jouir de la vue durant l’ascension.
On donne rendez-vous à Lucie au prochain point de passage, à Barèges Tournaboup.
Ce qui nous attend est une course dans la course puisque c’est un des seuls passages où on va descendre en continu sur plus de 10 kilomètres !
Comme prévu, la descente est très agréable, le sentier est praticable et la pente permet de lâcher un peu les jambes.
On met 40 minutes à repasser par le Col de Sencours.
Vous vous souvenez quand j’ai dit qu’on regretterait de ne pas s’être arrêté à l’aller ? En fait, on ne repasse pas exactement au même endroit et le ravito du retour est bien plus léger que celui de l’aller. On tire un trait sur notre soupe chaude…
La descente vers Barèges est très roulante. On court tout du long, mais cela met les organismes à rude épreuve. Ce n’est pas évident de faire un 10 km course après avoir majoritairement marché pendant 40 km. Durant la descente, on a même la chance d’apercevoir des lamas au loin !
Le passage à un endroit que je connais bien, Barèges Tournaboup
Nous arrivons à Barèges-Tournaboup au 50e km à 17 h après 12 h de course.
De mon côté, cette descente interminable a laissé des traces. J’ai encore le moral, mais je sens que ça va commencer à être dur ! Et ce n’est que le 50e kilomètre.
Dans ma stratégie du « jusqu’ici tout va bien », je sens que les choses peuvent très vite basculer.
On retrouve Lucie pour la dernière fois de la course puisqu’ensuite on traverse des zones non atteignables en voiture.
Le ravitaillement tombe à point nommé, d’autant qu’il est assez conséquent. J’en profite pour me faire un repas complet même si j’ai des difficultés à avaler quelque chose.
C’est maintenant une autre course qui commence. Il reste grosso modo une dernière grosse montée (+1000 m D+) puis une petite (+400 D+).
L’ascension vers la Hourquette Nère nous fait traverser des paysages rocailleux et boisés à la fois. J’adore cette typologie de terrain, l’association de la roche et du bois donne des paysages pleins de contraste.
J’arrive tant bien que mal au mini-ravitaillement situé au 58e kilomètre au lac de Coueyla-Gran.
Le soleil commence à décliner et la luminosité s’amoindrit de minute en minute.
Km 58, dernière grosse difficulté
La dernière partie de l’ascension me met dans le rouge. J’ai du mal à progresser, ça commence à être bien raide et je n’en vois jamais le bout. Au bout d’un moment, j’aperçois enfin le sommet, mais je dois m’arrêter, je n’y arriverai pas d’une traite. Je m’assois sur un rocher afin de grignoter mes mini-saucissons. Je les avais gardés exprès pour un coup de mou comme ça.
Cette pause tombe bien puisque du coup, on a l’occasion d’admirer les couleurs folles du coucher de soleil qui se situait dans notre dos lors de la montée.
Thomas est bien mieux que moi et c’est quand même hyper réconfortant et agréable de le savoir là et de pouvoir vivre cette course à deux.
J’atteins le sommet à 20 h 30, bien content d’avoir vaincu la dernière difficulté. À ce moment-là, dans ma tête, je me dis que c’est gagné ! Je ne suis pas arrivé jusqu’au 60e kilomètre pour arrêter là !
L’un des moments forts : le coucher du soleil sur la réserve naturelle du Néouvielle
On attaque directement la descente en direction de la réserve naturelle de Néouvielle.
Le spectacle qui s’affiche devant nous est alors exceptionnel !
Imaginez-vous quasiment seuls dans la montagne avec une vue sur deux lacs. Et là, vous avez les couleurs rougeâtres du coucher de soleil qui viennent illuminer ce tableau déjà idyllique.
La descente m’a apporté un peu de répit, mais dès que la pente se refait ascendante, j’ai beaucoup de mal.
La nuit me redonne une énergie insoupçonnée, par contre pour les photos, c’est raté !
Finalement, mon salut va venir de ce que je redoutais le plus : la nuit !
Sans trop l’expliquer, l’obscurité me redonne une énergie terrible. Et pourtant on recommence à grimper !
Ce qui est marrant dans la pénombre, c’est que les autres sens se mettent en éveil. J’entends distinctement le bruit du ruisseau que nous longeons alors que de jour, j’en faisais totalement abstraction.
La tombée de la nuit m’enlève, hélas, le plaisir de filmer et de faire des photos.
C’est dommage, car le cadre a l’air super joli de ce que j’en vois avec la frontale. C’est toujours une alternance de rochers et de sapins. C’est également très humide puisqu’un ruisseau se trouve juste à côté.
Thomas a pris un peu d’avance juste avant la tombée de la nuit. J’accélère le pas pour essayer de le rattraper d’autant qu’un petit groupe se forme avec lui et je ne veux pas me retrouver tout seul.
Dans la nuit, c’est plus reposant (et rassurant) d’avoir toujours quelqu’un devant qui montre le chemin.
J’en profite pour tirer mon chapeau aux organisateurs concernant le balisage de la course. Je n’avais encore jamais fait une course aussi bien balisée. On s’en rend encore plus compte une fois que la nuit tombe.
Tous les 20 mètres, on pouvait apercevoir un petit drapeau phosphorescent nous indiquant le chemin. Impossible de se perdre et c’est hyper agréable d’avoir ça en moins à se soucier à ce moment-là de la course !
Nous arrivons au dernier point de contrôle à Merlans au kilomètre 68 un peu avant 23 h.
Il commence à faire très froid, je profite donc de l’abri pour sortir mon coupe-vent imperméable. On s’arrête une bonne quinzaine de minutes dans la bonne humeur. J’avale une salade de fruits, je prends ça comme le dessert de mon repas pris à 17 h à Tournaboup !
On fait un bref topo de qu’il nous reste à faire : plus que 12 km à faire et surtout plus que 200 m de dénivelé positif !!
On textote avec les filles (Lucie et Mélanie, la femme de Thomas) pour essayer de leur donner une indication horaire d’arrivée (qui s’avérera trop optimiste…), elles sont impatientes de nous voir à l’arrivée (et d’aller au lit, la journée n’a pas été longue que pour nous !).
L’arrivée au beau milieu de la nuit : FINISHER !
On repart gonflés à bloc si bien que j’en oublie mes bâtons !
En ressortant dans la nuit, je prends instantanément un coup de froid terrible ! Malgré le coupe-vent, je suis en train de me congeler sur place. Heureusement, on réattaque direct par les 200 derniers mètres de dénivelé, de quoi se réchauffer assez vite !
Arrivés en haut, ça va beaucoup mieux, je suis réchauffé ! Il nous reste maintenant un peu plus de 10 km de descente avant l’arrivée.
Le début de la descente est assez facile, c’est presque du faux plat descendant donc c’est assez agréable, ça ne tire pas trop sur les jambes.
Au bout de 5 km, ça se corse. Le sentier bifurque soudainement à droite et on se retrouve alors directement dans le sens de la pente ! Là il faut sortir le frein et ça tape dur dans les jambes !
Au 77e kilomètre, on arrive au village de Soulan et on retrouve avec bonheur la… ROUTE ! Quel plaisir de courir sur la route et de pouvoir laisser trainer les pieds sans se soucier des racines et autres p****** de caillasses !
Bon, le plaisir ne dure pas très longtemps, le sentier vire à droite pour repartir dans la forêt et dans les cailloux…
La fin est interminable, j’ai 78 km à la montre et pourtant on a l’air encore bien paumés.
À 80 km (à ma montre), on aperçoit enfin les habitations, Thomas finit en roue libre, il me laisse sur place et on se donne rendez-vous à l’arrivée qui semble très proche… Mais 200 m plus loin, je vois un panneau « 2 km avant l’arrivée ». Bordel, j’ai envie de pleurer, il y a encore 2 km ! J’ai déjà 80,2 km à la montre. Je commence à marcher tellement ça me met un coup au moral. En plus, les organisateurs ont mis un panneau tous les 200 mètres… 1800m avant l’arrivée, 1600 m, 1400 m…
À 1400 m de l’arrivée, je reprends mes esprits, pas question que je subisse la fin de course comme ça ! Je ne vais pas faire ma feignasse pour 1,4 km alors que je viens de m’en taper 80 !
Les derniers 500 m se font dans le noir complet, au bord d’un ruisseau quand soudain j’aperçois des lumières et j’entends la voix du speaker !
J’allonge la foulée sur les derniers mètres. Les (maigres) applaudissements font chaud au cœur ! Je vois enfin le tapis rouge et l’arche d’arrivée, ça y est, le moment que je me visualisais la veille est enfin là : je suis FINISHER du GRP 2019 !
Donnez-moi cette ***** de médaille ! Et ce tee-shirt FINISHER ! Je vais dormir avec tous les jours de la semaine !
Je passe devant le ravito d’après course, impossible d’avaler quelque chose, je suis bien trop épuisé pour mâcher quoique ce soit !
Je vais rejoindre Lucie et Thomas qui est avec sa famille au complet, malgré l’heure tardive.
Maintenant, j’aspire qu’à une chose : une bière prendre une douche et m’allonger dans un lit !
Qu’est-ce que je retiens de cette course ?
Tout d’abord, j’aimerais remercier les bénévoles ! C’est une course parfaitement bien organisée. Il n’y a rien à redire, que ce soit la richesse de ce qui est proposé aux ravitaillements, le boulot extraordinaire sur le balisage du tracé, la bonne humeur et la gentillesse de tous les bénévoles, les parcours magnifiques…
À titre personnel, je suis bien évidemment très heureux d’avoir réussi à finir une telle course.
J’aime toujours autant l’ambiance qu’il peut y avoir dans ce genre de course longue. J’aime toujours autant l’émerveillement que me procure la traversée de tels paysages et la chance que j’ai de pouvoir le faire.
Après, à tête reposée, je ne sais pas si je serai prêt à en refaire autant. C’est quand même beaucoup d’entrainement pour y parvenir. Si j’habitais dans les Pyrénées, je ne me poserais pas la question, mais là, habitant dans les Landes, c’est difficile de venir s’entrainer en montagne.
Je pense à l’avenir rester sur des courses de moins de 50 km (voir 60 km si coup de cœur).
J’en profite également pour remercier Thomas de m’avoir attendu tout au long de la course et d’avoir fait ce GRP avec moi. Je vais essayer de me mettre un peu plus à ton niveau pour l’année prochaine ^^.
Et je remercie ma Lulu nationale de m’avoir encouragé tout le long de la course (et de m’avoir accompagné à toutes les courses préparatoires de février à juillet !).
Comme d’habitude, j’ai réalisé un petit film pour vous montrer un aperçu de la course (même si je n’ai pas pensé à filmer autant que j’aurais voulu). J’ai d’ailleurs oublié de filmer l’arrivée, trop content d’en finir.
Épinglez cet article sur Pinterest
Félicitations! Et merci pour ce récit très détaillé et très bien illustré. Pour bien connaître ce coin, vous me donneriez presque envie de le faire. Encore faut il avoir la caisse. Encore bravo!
C’est cool, c’est bien écrit, il y a de jolies photos. Félicitations pour ta course. Tu as suivi quel type d’entrainement pour ce 80km et combien de temps? Ce qui t’a clairement manqué c’est du travail en côtes, nan? Je prépare le trail de bourbon, un 111km à la Réunion (GRR). Bon courage pour la suite, je vais continuer de me balader sur ton site.
Salut Johan !
Merci pour ton message, ça fait bien plaisir 🙂
À la base, je m’étais inspiré de celui-ci mais finalement j’ai eu une année chargée donc j’ai pas eu du tout le temps de partir m’entrainer dans les Pyrénées donc j’ai fait au mieux avec ce que j’avais pas loin de chez moi, c’est à dire rien du tout ! Le plus important reste quand même de faire des courses jalons tout au long de la prépa ! C’est ça qui m’a sauvé si on peut dire.
Il m’a manqué de pas mal de choses pour être plus performant oui, travail en côte un peu mais également de la technique en descente et pour ça, obligé d’avoir un terrain propice !
En tout cas, bonne chance pour le GRR, ça a l’air magnifique en tout cas (et exigeant !!).
Romain